Quand un courriel a-t-il valeur juridique ?

Un chômeur se voit pénalisé par l’assurance-chômage pour n’avoir pas fourni en temps utile les preuves requises de ses recherches infructueuses d’emplois.

Il proteste en se référant à un courriel qu’il dit avoir envoyé à l’assurance-chômage. Comme preuve de cet envoi, il produit le courriel en question, portant la date de son expédition, ainsi qu’une capture d’écran.

La Cour cantonale lui donne raison : elle considère que le courriel en question fait bien la preuve de la remise à l’assurance-chômage, en temps utile, de la liste des recherches d’emplois.

L’office de chômage recourt cependant au Tribunal fédéral (TF), en vue d’obtenir la confirmation de la sanction qu’il avait prononcée.

Le TF rappelle sa jurisprudence en ces termes :

« Malgré les pertes de documents pouvant se produire dans toute administration, la jurisprudence a presque toujours indiqué que les assurés supportaient les conséquences de l’absence de preuve en ce qui concerne et la remise de la liste des recherches d’emploi (cf. arrêt C 294/99 du 14 décembre 1999 consid. 2a, in DTA 2000 n° 25 p. 122; cf. aussi les arrêts 8C_460/2013 du 16 avril 2014 consid. 3; 8C_591/2012 du 29 juillet 2013 consid. 4) et la date effective de la remise (arrêt C 3/07 du 3 janvier 2008 consid. 3.2). Le fait que des allégations relatives à la remise des justificatifs de recherches d’emploi (ou relatives à la date de celle-ci) soient plausibles ne suffit pas à démontrer une remise effective des justificatifs (ou une remise à temps). Une preuve fondée sur des éléments matériels est nécessaire (BORIS RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n° 32 ad art. 17, p. 206). »

Autrement dit, les assurés doivent prouver non seulement qu’ils ont envoyé quelque chose, mais que cela a été effectivement reçu par l’administration destinataire.

Bien entendu, un envoi sous pli recommandé est l’idéal. Aujourd’hui toutefois, on utilise beaucoup les moyens électroniques, notamment les courriels. Doit-on renoncer à cela ? Le TF ne le dit pas. Il dit cependant que les courriers électroniques n’ont une valeur juridique que si leur expéditeur peut prouver que l’administration destinataire les a reçus. Pour obtenir cette preuve, il faut à tout le moins un accusé de réception électronique.

En l’espèce, l’administration contestait avoir reçu le courriel. Par conséquent, faute d’une preuve fournie par le chômeur d’une réception effective de ce courriel par l’administration, le recours de l’office de chômage a été admis et la pénalisation du chômeur a été rétablie.

Une signature manuscrite reste en revanche nécessaire pour les recours ou d’autres actes juridiques. Or une telle signature doit être en original, ce qui n’est pas possible par courriel. Sont cependant réservées les certifications officielles des tribunaux et/ou administrations admettant les échanges électroniques.

ATF 8C_239/2018 du 12.2.2018 destiné à publication officielle

Notre commentaire :

En général, les administrations ne contestent pas la réception des courriels. Mais un citoyen qui ne veut prendre aucun risque doit demander, pour un courriel important, un accusé de réception électronique. Il faut savoir cependant que de nombreux sites n’ont pas de systèmes permettant d’obtenir un accusé de lecture d’un courriel par son destinataire. C’est le cas en particulier du site très répandu « gmail ». Il existe cependant, même dans ce cas, une possibilité d’obtenir un accusé de lecture : il suffit d’installer le programme complémentaire « streak » (cliquer sur google : « streak gmail ») et, si on suit les instructions, une touche s’installe dans gmail, permettant d’obtenir la fameuse attestation de lecture de n’importe quel courriel.

 

 

 

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