Pension alimentaire pour enfants : qui doit agir une fois les enfants adultes ?

Un père était tenu de payer des pensions alimentaires en faveur de ses deux filles, nées en 1993 et en 1995. Comme il était en retard, la mère engagea des poursuites en 2014. Toutefois, à ce moment-là, les enfants étaient déjà majeures. La mère considérait cependant qu’elle pouvait agir puisque les pensions étaient dues pour une période où les enfants étaient encore mineures. Elle obtient gain de cause, soit la mainlevée définitive de l’opposition formée par le père, en première instance, mais cette mainlevée est refusée en recours cantonal. Elle recourt au TF.

Cette autorité note que les filles n’ont pas cédé leur créance à leur mère. Quand bien même la valeur litigieuse de Fr. 30’000 n’était pas atteinte, le TF a accepté de traiter la question posée, car il ne l’avait jamais fait précédemment. Il s’agit donc d’une question d’importance fondamentale, justifiant que l’on ne s’en tienne pas à la valeur litigieuse minimale pour saisir le TF. Certes, l’article 318 alinéa 1 du Code civil (CC) autorise le parent d’un enfant mineur à agir au nom de celui-ci. Cela découle de l’autorité parentale. Cependant, celle-ci cesse à la majorité de l’enfant (article 296 en relation avec l’article 14 CC). La seule exception à cette règle concerne les cas de divorce ou le parent peut demander en son nom que la contribution alimentaire se poursuive au-delà de la majorité de l’enfant. En l’espèce, l’enfant est devenu majeur il peut agir lui-même contre son père. La mère n’a plus de pouvoirs. Par conséquent, c’est à juste titre que l’autorité cantonale a rejeté la mainlevée. Le recours au TF doit être rejeté.

ATF 5A_984/2014 du 3.12.2015, destiné à publication.

notre commentaire :

Ce résultat peut paraître discutable, dans la mesure où, de cette manière, l’enfant est obligé d’agir lui-même contre son père. On ne peut cependant considérer que le TF a mal jugé : effectivement, au jour de sa majorité, l’enfant récupère toute sa capacité juridique et la mère n’en a plus aucune. On peut aussi accepter ce résultat en considérant qu’il suffit, pour le cas où l’enfant n’entend pas agir lui-même — essentiellement pour des motifs affectifs — qu’il cède sa créance à sa mère afin qu’elle agisse sur la base de cette cession et donc en son propre nom. Ce n’est pas du tout quelque chose de compliqué : une cession se fait par un simple document écrit et signé.

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