Erreur de diagnostic : hôpital responsable aussi pour les séquelles indirectes

X, cuisinier, fait une chute le 9 octobre 2003 et se rend à la permanence Y, dont le médecin de garde diagnostique une « contusion à la hanche gauche », sans effectuer de radiographie. Le lendemain, il reprend son activité, mais les douleurs sont insupportables. Il se rend le soir même dans un autre établissement médical qui, cette fois, fait une radiographie qui révèle une fracture du col fémoral. Sur quoi des opérations sont effectuées et, trois mois plus tard, le patient reprend son travail.

Mais en août 2004, les douleurs augmentent et on diagnostique une « nécrose aseptique de la tête fémorale gauche ». Finalement, en janvier 2005, on met en place une prothèse totale de la hanche gauche, mais il subsiste des séquelles à un nerf sciatique, d’où des troubles moteurs du pied gauche et des douleurs neurogènes qui entraînent finalement une invalidité de 50 %.

X réclame des dommages et intérêts à la permanence Y. L’expert judiciaire explique en substance qu’une fracture du col fémoral doit être opérée en urgence, cela à cause de la vascularisation de la tête fémorale. Les tribunaux genevois admettent le lien de causalité entre l’invalidité actuelle et l’erreur de diagnostic commise au départ et allouent une partie des dommages et intérêts réclamés.

La permanence Y recourt au Tribunal fédéral (TF).

Cette autorité estime également que l’expertise judiciaire est probante : sans le retard dû à l’erreur de diagnostic, on aurait pu vraisemblablement sauver la tête fémorale. Il n’y aurait pas eu de nécrose. En tout cas, le risque d’une nécrose aurait été moindre. En effet, juridiquement, on peut, en cas de responsabilité pour une omission, se baser sur la vraisemblance prépondérante de ce qui se serait passé s’il n’y avait pas eu cette omission.

La permanence Y faisait aussi valoir le caractère exceptionnel, donc quasi imprévisible selon elle, du risque de lésion du nerf sciatique lors de la pose d’une prothèse de hanche. Certes, dit le TF, ce risque est relativement réduit (1 à 2 %). Toutefois, la Cour rappelle sa jurisprudence selon laquelle « le caractère adéquat d’une cause ne suppose pas que l’effet considéré se produise généralement ni même qu’il soit courant ; il suffit qu’il s’inscrive dans le champ raisonnable des possibilités objectivement prévisibles ». La causalité n’est donc pas interrompue,  et cela parce que l’opération de la prothèse a été rendue nécessaire par l’erreur initiale de diagnostic.

Ainsi, la responsabilité de la permanence Y est confirmée par le TF.

ATF 4A_65/2019 du 18.2.2020

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