Droit à une rente AI pour une femme au foyer atteinte dans sa santé depuis des décennies

Madame A. avait déposé une première demande AI en 1975. À cette époque, elle avait travaillé comme vendeuse, mais elle avait ensuite arrêté en raison de graves problèmes à la colonne vertébrale (multiples opérations, marche difficile). Une rente lui avait été octroyée pour un certain temps. Par la suite, elle a recommencé à travailler et obtenu une demi-rente AI, prestation qui a été supprimée lors de son mariage en 1980 (car à l’époque la demi-rente était octroyée en tenant compte de la situation financière).

Durant plus de 30 ans par la suite, elle a été femme au foyer, avec quelques petites activités annexes, notamment de conciergerie. Elle était en outre dépressive.

En 2011, elle demande une rente AI entière, qui lui est refusée par l’office AI du canton de Fribourg, au motif qu’elle doit être considérée comme une ménagère et que, dans cette activité, elle n’est entravée qu’à hauteur de 28 %. Elle fait recours au tribunal cantonal, qui rejette son recours en considérant qu’elle est femme au foyer par choix et qu’on doit donc pas tenir compte d’un handicap professionnel.
Madame A. recourt donc au Tribunal fédéral (TF) en faisant valoir que si elle n’était pas atteinte dans sa santé, elle exercerait une activité lucrative depuis fort longtemps et que, par conséquent, on ne peut pas lui appliquer un statut de ménagère. Il faudrait selon elle procéder à la comparaison des revenus professionnels avec et sans invalidité, selon la méthode dite « générale » (article 28a al.1 LAI). Elle demande que le jugement cantonal soit revu dans le sens d’une rente entière ou à tout le moins qu’une expertise soit ordonnée par le TF.


Cette autorité relève qu’avant de devoir arrêter de travailler pour des raisons de santé, Madame A. avait effectivement exercé un emploi. Le TF écrit : « Il convient donc de se demander non pas si l’assuré aurait cherché à se réinsérer sur le marché du travail au moment du départ à la retraite de son époux, après avons été inactive pendant plusieurs dizaines d’années et alors qu’elle était déjà atteinte dans sa santé, mais d’examiner quelle aurait vraisemblablement été son activité au moment du prononcé de la décision litigieuse si elle n’avait pas été atteinte dans sa santé de manière invalidante et ce depuis 1980 en tout cas ». La recourante avait toujours tenté de travailler dans la (faible) mesure de ses posssibilités. Elle avait repris une activité de concierge à temps partiel durant une vingtaine d’années jusqu’en 2010, et elle avait participé à des marchés artisanaux. Le faible taux d’activité ne résultait pas d’un libre choix, mais de l’atteinte à la santé. De plus, on ne peut pas, comme le fait l’office AI, reprocher à cette assurée de ne demander une rente AI que pour des raisons financières, puisque c’est justement le but des rentes AI que de pallier un manque financier. Le recours doit donc être admis et il n’est même pas nécessaire de renvoyer la cause pour une expertise, car l’invalidité de cette assurée durant 30 ans est clairement établie. Le TF prononce lui-même que Madame A. a droit à une rente entière d’invalidité dès le 1er mai 2011.

ATF 9C_722/2016 du 22.2.2017

-commentaires (0)-

Publier un commentaire