Quand peut-on exiger la traduction d’une pièce médicale ?

M. A. reçoit une décision négative de la SUVA, qui invoque un rapport médical rédigé en allemand par l’un de ses médecins-conseils. L’assuré est de langue maternelle française. Après avoir vainement demandé une traduction française de ce rapport, l’assuré recourt auprès de la Cour des assurances sociales du canton de Fribourg contre la décision refusant les prestations. Cette autorité rejette le recours notamment parce que le document médical en question ne serait pas vraiment déterminant  et aussi parce que l’assuré a un avocat (il faut rappeler que dans ce canton bilingue, les avocats sont censés connaître les 2 langues). M. A, via cet avocat, recourt au Tribunal fédéral (TF).

Cette autorité lui donne raison sur la question de la langue, et renvoie le cas à la SUVA pour nouvelle décision, après avoir fourni la traduction exigée. Rien ne dit cependant que, plus tard,  la SUVA décide autrement. Bien évidemment, le cas pourra ensuite revenir à la Cour cantonale, puis au TF…

Le TF rappelle sa jurisprudence 127 V 219, 128 V 34. Il analyse le principe de la territorialité des langues (art. 70 de la Constitution).. Les administrés ont le droit de recevoir les documents dans la langue de la procédure. De plus, la portée du rapport médical dont la traduction était demandée ne peut pas être d’emblée minimisée.

La SUVA doit en outre payer Fr. 2’800.- de dépens pour l’instance fédérale, et la Cour cantonale devra en outre fixer d’autres dépens.

ATF 8C_90/2014 du 19 décembre 2014

Notre commentaire :

Que de temps et d’énergie et de frais perdus pour rien ! L’assuré, pour une question de traduction, devra refaire tout le parcours du combattant auprès de l’instance cantonale puis fédérale, car il y a fort à parier que la SUVA ne modifiera en rien son refus sur le fond. Les frais de la SUVA (frais internes et dépens) , qui se reflètent évidemment sur les primes, sont bien plus élevés que n’auraient été ceux d’une traduction ! On se demande parfois si le bon sens est vraiment la chose la mieux partagée dans l’administration… Pour l’assuré, c’est d’ailleurs peut-être une victoire à la Pyrrhus, puisque le TF a déjà laissé entendre que ce rapport – négatif – a une certaine importance …

 

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